Devenir mère est souvent dépeint comme un chemin féerique, la concrétisation d’un rêve longtemps caressé. Pourtant, derrière cette image idéalisée se cache parfois une réalité bien plus complexe et douloureuse pour certaines femmes : le regret maternel. Ressenti encore trop tabou et peu abordé, ce sentiment mêle désillusion, fatigue, et charge mentale écrasante. Il s’agit d’une expérience vécue à la croisée d’émotions contradictoires où l’amour envers l’enfant coexiste avec un profond mal-être lié au rôle imposé de la maternité. À travers les récits authentiques, les analyses psychologiques et sociétales, nous explorons ici les origines, les facteurs aggravants, et les répercussions de ce vécu souvent caché, mais essentiel à entendre.
Table des matières
- 1 Les racines profondes du regret maternel : entre rêve et réalité vécue
- 2 La charge mentale maternelle : un poids invisible qui forge le regret
- 3 Regret maternel versus burn-out parental : distinguer les réalités vécues
- 4 Impact du regret maternel sur le lien mère-enfant et la famille élargie
- 5 Comment déjouer le tabou autour du regret maternel et ouvrir la parole
- 6 Stratégies concrètes pour apaiser le sentiment de regret maternel
- 7 L’impact des modèles culturels et de l’éducation sur le regret maternel
- 8 Vers des changements sociétaux pour soutenir les mères en souffrance
- 9 Questions fréquentes autour du regret maternel
Les racines profondes du regret maternel : entre rêve et réalité vécue
Le regret maternel ne naît pas d’un vide affectif envers l’enfant, mais d’un décalage brutal entre l’image idéalisée qu’on se faisait de la maternité et la réalité du quotidien. La société et les médias projettent encore majoritairement une vision lumineuse, où la maternité est source d’épanouissement instantané et permanent. Pourtant, cette représentation masque les défis souvent invisibles : nuits entrecoupées, responsabilités sans fin, et la pression constante d’être une « mère parfaite ». Ce fossé entre attentes et vécu peut engendrer un sentiment d’échec personnel et nourrir le regret.
Astrid, une trentenaire française expatriée, témoigne de cette fracture. Sa grossesse désirée, son accouchement sans complication ne l’avaient pas préparée aux montagnes russes émotionnelles et physiques qui suivent. Quinze mois après la naissance de son fils, Astrid évoque sans détour ses moments de solitude intense, aggravés par le stress lorsque son bébé a dû être hospitalisé dès ses trois mois pour une intolérance alimentaire. Ces expériences, loin d’être marginales, révèlent une facette peu visible mais criante de la maternité :
- La fatigue mentale omniprésente, aggravée par la surcharge émotionnelle.
- Le cortège d’angoisses autour de la santé et du bien-être de l’enfant.
- L’isolement social, particulièrement marqué chez les jeunes mères éloignées de leur réseau de soutien.
Cette détresse ne traduit ni un rejet de l’enfant, ni une dépression systématique, mais un profond mal-être lié à ce rôle contraignant, aux responsabilités incessantes et à la perte d’une liberté personnelle précieuse. C’est précisément cette tension entre amour inconditionnel et difficulté quotidienne qui forge la sensation de regret maternel.
En outre, ce sentiment s’inscrit dans un contexte social qui complexifie encore la parole maternelle. Les mères sont soumises à un regard normatif exigeant, où toute expression de difficulté est souvent perçue comme une défaillance morale. Cette injonction sociale à la « mère parfaite » rougit les mères qui souhaiteraient simplement dire qu’être mère, c’est parfois être épuisée, dépassée, et même, regretter.
Dans ces conditions, il devient essentiel de reconnaître ce vécu, non pour stigmatiser la maternité, mais pour en montrer toutes les nuances. C’est aussi une invitation à revisiter nos représentations collectives et à écouter plus attentivement ces voix longtemps tues.

La charge mentale maternelle : un poids invisible qui forge le regret
La charge mentale, ce fardeau invisible qui pèse sur les épaules des femmes, est un facteur central dans le regret maternel. Loin de se limiter aux seuls gestes quotidiens, elle englobe la gestion globale du foyer, la coordination des rendez-vous médicaux, la planification des repas, sans oublier le maintien d’une atmosphère familiale apaisée. Cet effort constant d’anticipation nécessite une attention et une énergie colossales, souvent méconnues, parfois ignorées, mais qui s’accumulent au fil des jours jusqu’à l’épuisement.
Les témoignages abondent sur ce point dans les communautés comme Le Coin des Mamans ou Parenthèse Psy. Une mère décrit par exemple comment des douleurs physiques persistantes en fin de grossesse l’ont déjà marginalement préparée au déséquilibre à venir, entre contraintes physiques et pression psychique accrue. Cette charge se manifeste par :
- Un sentiment de rester « en alerte » permanent, même lors des rares instants de repos.
- La difficulté à déléguer certaines tâches, faute d’un soutien réel ou d’une répartition équitable.
- La perte progressive de repères identitaires, la mère s’effaçant derrière son rôle parental.
- Une sensation de solitude accrue, souvent exacerbée en milieu urbain ou en situation d’expatriation.
Selon la psychologue clinicienne Véronique Borgel-Larchevêque, spécialisée en périnatalité, cette charge mentale n’est pas universelle mais touche particulièrement celles qui manquent de soutien – que ce soit du partenaire, de la famille ou de proches. Là réside un clivage douloureux entre celles qui peuvent partager ces responsabilités et celles qui les portent seules ou quasi-seules.
Pour mieux illustrer ce phénomène, voici quelques manifestations fréquentes relevées dans la sphère du regret maternel :
- La gestion obsessionnelle de la santé et du bien-être de l’enfant, épuisante psychiquement.
- La sensation d’être constamment sollicitée, sans jamais pouvoir se déconnecter.
- Le sentiment que chaque décision impacte directement la “qualité” de mère que l’on est.
- Un cycle sans fin entre la culpabilité de ne pas être la mère idéale et la fatigue de devoir tout gérer.
Il apparaît ainsi clairement que la charge mentale n’est pas un simple concept théorique mais un élément vécu, profondément lié à la construction du regret maternel. C’est une forme d’aliénation discrète, mais puissante, qui enferme les mères dans un rôle qui peut devenir insoutenable.
Repartager la charge : un impératif sociétal
Pour redonner du souffle aux mères en proie à ces difficultés, il importe de penser la parentalité comme un engagement collectif, où la responsabilité repose sur tous. Cette revendication se niche au cœur des forums comme Maman Éclairée ou Esprit Maternel, où l’on appelle à une égalité réelle dans la gestion du foyer. Voici quelques pistes pour alléger cette charge :
- Favoriser la prise en charge partagée entre parents dès la grossesse.
- Impliquer davantage les pères dans les soins quotidiens et l’éducation.
- Développer des réseaux de soutien locaux pour rompre l’isolement.
- Revaloriser les temps de pause et les loisirs personnels des mères.
- Reconnaître socialement le poids invisible du travail domestique et émotionnel.
Ces pistes ne représentent pas un rêve utopique, mais un enjeu de santé publique, nécessitant des politiques adaptées et une transformation culturelle profonde.

Regret maternel versus burn-out parental : distinguer les réalités vécues
Il est crucial de différencier le regret maternel du burn-out parental, bien que les deux se manifestent souvent par un profond épuisement. Le burn-out parental est caractérisé par un épuisement physique et psychique sévère, où le parent peut totalement se détacher affectivement de son enfant, adoptant parfois un comportement mécanique et distant. En revanche, le regret maternel se traduit davantage par une souffrance liée aux responsabilités et à la perte de liberté, sans rupture complète du lien affectif.
Pour mieux comprendre, voici les caractéristiques distinctives des deux phénomènes :
- Burn-out parental : Épuisement extrême, mise en place de distances affectives, sentiment d’agir « comme un robot ».
- Regret maternel : Amour intact pour l’enfant, mais opposition émotionnelle face aux contraintes du rôle maternel.
- Le regret maternel n’implique pas nécessairement un désinvestissement affectif, contrairement au burn-out parental.
- La culpabilité est souvent plus intense dans le regret maternel, alourdie par le tabou et le silence social.
Ces différences sont importantes pour adapter les réponses thérapeutiques et les soutiens nécessaires. Astrid, après avoir traversé un épisode de dépression post-partum, décrit comment elle a dû repenser son rôle, poser ses limites et renouer avec son enfant pour sortir de l’aliénation du regret sans basculer dans le burn-out.
Le rôle des professionnels : un accompagnement différencié
Les psychologues, comme ceux impliqués dans des plateformes telles que Parentalité Décryptée ou Parenthèse Psy, insistent sur l’importance d’une écoute fine et d’accompagnements personnalisés. Ils soulignent que :
- Une prise en charge thérapeutique peut aider à nommer et gérer le regret maternel.
- Un dialogue ouvert évite l’isolement, favorisant le partage d’expérience.
- La reconnaissance sociale de ce sentiment est centrale pour déstigmatiser.
Sans ce soutien, le risque est que le regret non exprimé se transforme en mal-être chronique, avec retentissement sur la santé mentale et la qualité de la relation mère-enfant.
Impact du regret maternel sur le lien mère-enfant et la famille élargie
Le regret maternel, en enfermant parfois la femme dans un rôle contraignant, peut fragiliser le lien avec l’enfant. Pourtant, il est important de préciser que ce regret ne remet pas en cause l’amour porté à l’enfant, mais s’enracine dans la difficulté à gérer les aspects pratiques et émotionnels du rôle.
Plusieurs conséquences se dessinent ainsi :
- Une mise en distance émotionnelle temporaire, parfois nécessaire pour gérer la surcharge.
- Une potentielle altération des interactions spontanées, par fatigue ou stress accumulé.
- Un impact sur la dynamique familiale, où le parent en difficulté peut s’éloigner du conjoint et des proches.
- Des effets possibles sur le développement affectif et la sécurité émotionnelle de l’enfant, particulièrement si le regret reste enfermé et non reconnu.
Le soutien et la parole deviennent alors essentiels pour prévenir ces conséquences. La psychologue Véronique Borgel-Larchevêque insiste sur le fait que la manière dont la mère parle de ce ressenti à son enfant est primordiale. Formuler le regret avec des mots bien choisis évite à ce dernier de se sentir rejeté ou responsable.
Dans certains cas, le sentiment de regret pousse à un découplage temporaire du rôle maternel, mais pas d’un abandon affectif. Ce mécanisme est souvent une stratégie inconsciente visant à préserver la santé psychique de la mère tout en maintenant un cadre protecteur pour l’enfant.
Le dialogue au sein de la famille et avec les professionnels de La Voix des Mères est un levier clé pour reconstruire un équilibre durable, où le rôle de mère est vécu de manière plus authentique, moins aliénante.

Comment déjouer le tabou autour du regret maternel et ouvrir la parole
Longtemps, le regret maternel a été un angle mort dans le débat public, un silence sous-jacent tant il dérange les injonctions sociales. Pourtant, la parole autour de ce ressenti est indispensable, non seulement pour déculpabiliser, mais aussi pour redonner aux mères la capacité de se reconnaître dans une réalité plus complexe et diversifiée.
Les initiatives récentes, comme la création de clubs de paroles, les témoignages sur Mère & Sentiments, ou encore les communautés virtuelles sur Paroles de Mères permettent de faire émerger ces voix. Ces espaces offrent :
- Un lieu d’écoute bienveillante, exempt de jugement.
- La possibilité d’échanger librement sur les émotions vécues.
- Un soutien par la reconnaissance mutuelle, évitant l’isolement.
- Des ressources et conseils concrets pour vivre au mieux ces passages difficiles.
C’est un puissant contre-pied à la pression sociétale et un souffle d’air pour des mères parfois écrasées par leur rôle. Le soutien de réseaux comme PsychoEnfance s’ajoute également à ce mouvement, offrant un appui professionnel aux familles.
Il est fondamental que cette parole devienne partie intégrante du récit maternel moderne, sans tabous ni culpabilité, car en déployant la diversité des vécus, c’est toute la société qui gagne en compréhension et en humanité.
Stratégies concrètes pour apaiser le sentiment de regret maternel
Apprivoiser le regret maternel ne se fait pas du jour au lendemain, mais plusieurs pistes peuvent aider à sortir de la spirale négative et renouer avec un équilibre personnel plus serein.
Essentiellement, il s’agit d’un travail sur soi, souvent accompagné, à travers :
- La reconnaissance du sentiment sans culpabilité ni honte.
- La recherche d’un soutien adapté : professionnel, familial, social.
- La redéfinition des attentes et des priorités pour alléger la charge mentale.
- L’intégration de moments d’évasion et de self-care réguliers.
- La communication ouverte avec le partenaire pour partager les responsabilités.
Astrid, par exemple, explique que son cheminement s’est appuyé sur :
- Des séances de thérapie individuelle pour explorer ses émotions.
- Une thérapie de couple pour réaligner les attentes et le partage des tâches.
- Un dialogue quotidien avec d’autres mères via son compte Instagram, lui permettant de sortir de la solitude.
- L’écriture de son livre, acte libérateur qui a permis de nommer son vécu.
C’est cette diversité de stratégies qui permet de tendre vers une sérénité nouvelle, où le regret se transforme en une force d’apprentissage et d’acceptation.
L’impact des modèles culturels et de l’éducation sur le regret maternel
Les vécus de maternité sont toujours filtrés à travers des prismes culturels et éducatifs spécifiques. Dans sa jeunesse, Astrid a connu une éducation stricte, aux relations difficiles avec ses propres parents. Cette histoire personnelle contribue à complexifier son rapport à la maternité, entre désir d’être une mère différente et hantise de répéter des schémas délétères.
Chaque femme porte ainsi en elle les traces de son enfance, qui peuvent influencer sa capacité à accueillir pleinement son rôle maternel. Par exemple :
- Une éducation rigide peut susciter un perfectionnisme exacerbé et donc une charge de stress accrue.
- Des modèles parentaux absents ou aimants de manière conditionnelle peuvent nourrir le sentiment d’être « insuffisante ».
- Le regard collectif sur la mère idéale varie selon les cultures, modifiant la pression et la culpabilité ressenties.
Il est crucial de prendre en compte ces héritages pour comprendre les origines du regret maternel. La reconquête d’un Esprit Maternel mis à mal passe par un travail de déconstruction des mythes familiaux et sociaux, accompagné souvent par un soutien thérapeutique.
De plus, le rôle des institutions éducatives et des professionnels du soin est de mettre en lumière cette complexité et d’adapter leurs approches, pour soutenir chaque femme dans sa singularité. Le chemin vers une parentalité épanouie est un chantier collectif qui exige clairvoyance et écoute.
Vers des changements sociétaux pour soutenir les mères en souffrance
Le regret maternel n’est pas qu’une histoire individuelle : il est aussi le miroir d’une société qui peine à reconnaître la complexité et l’ampleur du rôle maternel. En 2025, les enjeux sont perceptibles à plusieurs niveaux :
- Politiques publiques : il faut renforcer les dispositifs de soutien à la parentalité, faciliter l’accès à la santé mentale périnatale, garantir des congés parentaux partagés.
- En milieu professionnel : créer des environnements plus flexibles pour les mères, lutter contre les discriminations liées à la maternité et promouvoir une meilleure conciliation vie pro/vie perso.
- Médias et culture : porter une parole plus réaliste sur la maternité, débusquer les clichés et permettre aux mères de se reconnaître dans des récits pluriels.
- Lieux de rencontre et d’échange : multiplier les espaces conviviaux avec une dimension inclusive et sécurisante, des forums comme Sensorielle Maman ou Maman Éclairée incarnent bien cette aspiration.
Ces évolutions sont nécessaires pour apaiser les souffrances individuelles et collectives, et ouvrir la voie à une maternité vécue dans la diversité et le respect des parcours singuliers.
L’écoute attentive de ces voix, que nous avons tenté de rendre visibles, appelle à une transformation profonde des mentalités autant que des structures.

Questions fréquentes autour du regret maternel
- Le regret maternel signifie-t-il que je n’aime pas mon enfant ?
Non, le regret maternel concerne surtout les contraintes et les responsabilités liées au rôle de mère, l’amour de l’enfant, lui, reste intact. - Est-ce un signe de dépression post-partum ?
Pas nécessairement. La dépression post-partum est une pathologie nécessitant un suivi médical, alors que le regret maternel est un ressenti complexe, souvent passager. - Comment parler de ce sentiment sans faire de mal à mon enfant ?
Il est important d’exprimer ce ressenti avec des mots adaptés et à un moment où l’enfant est en âge de comprendre, en insistant sur l’amour inconditionnel que vous lui portez. - Peut-on surmonter le regret maternel ?
Oui. Avec un accompagnement adapté, une communication ouverte et un partage des responsabilités, il est possible de retrouver un équilibre apaisé. - Le regret maternel touche-t-il toutes les mères ?
Non, mais il est plus fréquent chez les femmes isolées, avec peu de soutien, ou confrontées à une charge mentale excessive.
